Rose Pastel

Les excuses

C’était pas très bien parti mais j’ai réussi à lui dire que j’étais désolée.
Je pensais qu’il m’aurait répondu : "ah bah enfin ! C’est pas trop tôt !" Ou alors "t’en fais pas, va."
(comme j’arrive toujours pas à le cerner, je m’attends à tout et à rien)
En réalité, il m’a répondu : "Mais arrête…" (avec une prolongation dans le ê et un air de j’en ai marre)
Et je ne sais pas si c’était : "mais arrête de parler de ça" ou "mais arrête de t’excuser".
Je pense que c’était le 1er parce qu’il était contrarié. Pourtant, c’est bien lui qui n’arrête pas de revenir là-dessus.

Parfois, je n’ai plus envie de dire quoique ce soit. Juste de faire mon boulot en silence. Certains jours, c’est clairement ça : à la limite du "bonjour, au revoir".

Même si je fais des tâches en plus qui n’ont rien à voir avec mon poste (faut être polyvalent, maintenant…) il est encore capable de faire allusion aux jeunes qui ne veulent plus travailler de nos jours, avec un regard insistant dans ma direction…

Je devrais m’en foutre mais il me soûle. Je lui réponds rien quand c’est comme ça. Je ne sais même pas quoi lui dire et je n’ai pas envie d’entrer dans un débat houleux comme il adore.
Je veux juste bosser tranquille. Et rigoler.

Parfois on rigole. Pendant une petite période, on se marrait trop bien. On était dans une bonne période. Les premiers instants de la rencontre étaient passés, je parlais un peu plus, contrairement à mon arrivée où je ne disais rien, et comme c’était encore un peu le début (1 an, 1 an et demi que j’étais dans la boite) j’avais pas encore pu trop le contrarier. Le soir, quand il ne restait presque plus personne à l’entreprise, on se relâchait et on se marrait bien.
Parfois, on rigole toujours un peu, mais ce n’est plus pareil.

Je ne sais pas si je ne supporte plus le fait que mes collègues me charrient ou si je ne l’ai jamais supporté et c’est le naturel qui revient au galop.
Enfants, on n’a jamais eu l’habitude de se charier entre frères et sœurs, les parents non plus. On est tous très vrais, un peu 1er degré sur les bords et susceptibles. Du coup, quand on me dit qqch, je le crois, sans me douter que c’est un grosse connerie. Avec le temps et les fréquentations, je sais qu’il faut pas croire tout ce que j’entends. Mais mes réflexes, c’est ça : croire d’emblée les gens, réagir au 1er degré d’emblée et faire un effort pour ajuster les degrés au besoin, parfois trop tard, avoir confiance en les gens et toujours croire qu’ils sont gentils dès le début. Autant vous dire que je tombe de haut parfois. Surtout quand un collègue me rapporte ce qu’un autre collègue a dit dans mon dos. On est d’accord qu’on préférerait ne pas le savoir, ou ya que moi qui veut vivre sur son petit nuage et croire au mythe que tout le monde il est gentil ?